22/03/2009

La cabane auprès du golf


Question déco, les cabanes ont la cote. Le centre de postcure psychiatrique de La Mainguais, à Carquefou (44476), possède la sienne, toute jolie. Posée en lisière du terrain de golf, elle rompt quelque peu avec le style des bâtiments voisins. Analyse d’un choix architectural.

Le centre de la Mainguais jouit de bâtiments très beaux et fonctionnels conquis en 2005 sur d’anciens marécages. Les pentes zinguées et la palette jaune gris offrent une harmonie pensée entre un mail (prononcez « maïe » et pas « melle » !) couru par les joggeurs du quartier et un terrain de golf chic et vallonné. Foyers et ateliers partagent une esthétique des plus réussies. Ils se distinguent subtilement les uns des autres, qui par l’emploi de parements de bois, qui par des toitures en zigzags, lesquelles rappellent les usines d’autrefois.

Depuis quelques mois, un nouvel édifice est venu compléter le réseau de bâtiments institutionnels. Il s’agit d’une cabane en tôle mince destinée au remisage des tondeuses à gazon de l’atelier thérapeutique « Espaces verts ». La construction, d’une superficie d’à peu près dix mètres carrés, est à même d’accueillir des individus de taille moyenne, sachant que le critère est actuellement en France de un mètre soixante seize pour les hommes. Au delà, on se cogne la tête.

Elle n’est pas directement accolée à la blanchisserie sa voisine. Une ruelle d’un mètre de large environ permet la circulation des personnes ou le stockage informel de plantations expérimentales en petits godets. De part sa forme générale, ses dimensions modestes, ses coloris, la construction rompt avec le vocabulaire architectural alentour. Seul l’emploi d’un matériau commun (la tôle) l’y apparente lointainement. Un bâillement des portes coulissantes indique une fabrication légère, ou un montage aléatoire, ou les deux.

La cabane tourne le dos aux golfeurs guidant en procession leurs caddies électriques à quelques mètres de là. Un tantinet frondeuse, la cabane auprès du golf témoigne d’une anarchie bon enfant, et bien française au fond, où il y aurait du Robert Doisneau et du Jacques Prévert, des gens biens. Tiens, vous vous souvenez du film de Jean Becker Les enfants du marais ? Eh bien la cabane auprès du golf, c’est un peu ça : de l’humanisme populiste prompt à réchauffer le coeur. Est-elle incongrue ou dérisoire ? Magnifique à sa façon, la cabane vous plante là sa poésie foutraque de jardin ouvrier. Courageuse de pousser à l’ombre grise d’une blanchisserie qui ne sent pas toujours très bon, elle se déplie en quatre pour résister à l’emprise des normes en tous genres, ne fussent-elles qu’esthétiques.

Et à l'époque qu'on vit, un peu d'esprit de résistance, ce n'est vraiment pas un luxe.

Enregistrer un commentaire